Lucien Etchezaharreta (Journaliste et membre du premier Conseil d’Administration de Egunkaria)
Il a fallu sept ans pour que les responsables du quotidien en langue basque « Egunkaria » soient enfin jugés après avoir été iniquement arrêtés et torturés. La relaxe obtenue ce lundi par un jugement de l’Audiencia Nacional de Madrid montre, ce que tout citoyen basque savait parfaitement, qu’il n’y eut jamais de « main mise de l’organisation ETA » sur la direction du journal et que l’accusation ne reposait sur aucun fondement sérieux.
La fermeture du quotidien basque Egin en 1998 avait suscité fort peu de réactions dans la « grande » presse parisienne et française. Celle du journal écrit en langue basque « Egunkaria » en 2003 a connu le même climat d’indifférence. Pourtant, elle-même a été victime de la censure politique et de nombreuses interdictions au cours du siècle précédent, ne serait-ce que pendant la guerre d’Algérie. Oubliant que la liberté d’expression ne se divise pas et qu’elle est un fondement de la vie démocratique et ignorant que cette même presse basque exprime la vivacité d’une communauté culturelle et historique, elle a laissé pourrir une situation d’une injustice flagrante, qui ne visait qu’à étouffer l’expression de cette communauté bascophone, cela pendant sept ans.
On s’est beaucoup pressé pour accoler le mot terroriste aux victimes d’une répression qui s’est attaquée ces dernières années à de nombreux secteurs de la vie culturelle et sociale du Pays Basque sud. L’heure est à une réparation de ce silence outrageant. S’élevant au-dessus de la rumeur, on aimerait que cette même presse qui se dit soucieuse de vérité et d’esprit critique répercute ce jugement et permette un nouveau respect à l’égard des cinq accusés relaxés ainsi qu’aux milliers de personnes qui ont appuyé la démarche historique de la création et de la vie de ce quotidien en langue basque qui naquit le 6 décembre 1990.